Comment j’ai succombé au Côté Obscur

Il ne peut pas y avoir de bon blog sans un post sur Star Wars. Point.

Là maintenant tout de suite, je suis relativement fière de moi car j’ai réussi à suivre le buzz “Episode VII” avec une distance à peine forcée. On revient quand même de vachement loin. À l’époque où allait sortir l’Épisode I, je me souviens avoir fait un véritable carnage de mega-octets. Attention, je parle d’une ère reculée que ne connaissent pas les moins de vingt ans. Un temps sans Fibre, ADSL ou internet illimité. Une ère donc, qui me rend toujours un peu nostalgique en repensant au pépiement d’un bon vieux modem 56k, et aux trésors de patience qu’il fallait pour télécharger un malheureux mp3 sur Napster. En priant pour ne pas tomber sur un clip de cul en ultra Low-Definition à la place. (D’ailleurs, puisqu’on en parle, la quantité de musique de merde que j’écoute n’a cessé d’augmenter en même temps que le débit de ma connexion internet…Coïncidence ? Je ne crois pas.)

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Le marketing Disney a pourtant été hyper agressif.

Et donc, en cette période reculée je me souviens pertinemment avoir flingué dès le cinq du mois le forfait internet familial rien que pour voir les cornes de Dark Maul dépasser de sa capuche dans le dernier trailer de « La Menace Fantôme ». Et ceci de façon récurente jusqu’à la sortie du film.

Confidence, amis lecteurs: jusqu’à il y a très peu de temps, la date a laquelle j’ai pu m’asseoir dans le ciné pour mater ledit Épisode I a été un de mes mots de passe internet. Et pour cause : je n’oublierai jamais le frisson d’anticipation qui a parcouru la salle pleine à craquer lorsque l’obscurité s’est faite, ni les hurlements de bonheur jouissifs qui ont fendu le silence lorsque le thème d’ouverture a retenti.
D’ailleurs, si je peux ouvrir une parenthèse : annuler le visa d’exploitation de “La vie d’Adele”, d’accord, mais laisser des mômes de moins de douze ans assister à un film où il y aura genre trente orgasmes en simultané dès la première seconde, ça choque personne ? Une veille de Noël en plus ? Fin de la parenthèse.

J’habitais un patelin absolu, et une telle ferveur était juste hallucinante.

En y repensant, je garde un souvenir bien plus ému de tout ce qui a entouré le film que du film lui-même. Qui était quand même pas terrib’-terrib’ il faut bien se l’avouer. HEUREUSEMENT qu’il y avait Nathalie Portman pour sauver la trilogie.

À l’époque, j’avais déjà lu une bonne dizaine de romans issus de l’univers Star Wars. Le fait que j’engloutissais au kilo tout ce qui était rédigé sur du papier n’est PAS une excuse suffisante, j’en suis consciente.

Mes dimanches après-midi se passaient avec ma Nintendo 64 aux commandes d’un X-Wing du Rogue Scadron et je me souviens avoir passé des heures sur les courses de Star Wars : Podracer avec frangin. Ce qui donnait lieu à des discussions ubuesques du genre : “j’ai claqué tous les peggats de nos 50 heures de jeux pour pimper des jantes en alu sur le pod d’Anakin, c’est trop le swag ! “.

Je vous passerai les discussions que j’ai eu dix ans plus tard avec mes collègues, le genre de débats qui vous donne l’impression de vous être perdu dans un épisode de The Big Bang Theory: entre le steak frites et un yaourt nature, on parlait de la menace Yuuzhan Vong, des techniques d’endoctrinement Siths et de “Contrebandiers vs Jedi, ces boy-scouts”. Sans oublier les questions techniques fondamentales du genre “quel système de poussée peut faire décoller le Croiseur Nabu quasiment à la verticale ?” (ma boîte est extraordinaire).

J’ai l’impression de faire un coming out, c’est magnifique.

Bref. C’est donc sans grande surprise que tout mon superbe détachement sur ce sujet ait fini par fondre comme neige au soleil et qu’une bande de comparses m’ait convaincue de poser ma matinée pour aller squatter l’ UGC des Halles demain au saut du lit. Ils n’ont pas eu à déployer beaucoup d’efforts.

Le retour du come-back

Salutations.
Chers amis, j’ai le bonheur de vous annoncer que vous vous trouvez face à une rechute.

rechute

Hop, une image libre de droits pour fêter ça

Le blogging et moi, c’est une histoire houleuse et compliquée, faite de ruptures et de réconciliations. Mes premiers pas dans le domaine ont accompagné une année d’études à l’étranger, porté par la volonté de raconter à mes petits camarades mes frasques d’étudiante perdue à Londres. Après un an de break, j’ai remis le couvert lorsqu’une faille spatio-temporelle m’a recraché un beau matin à Delhi pour vivre l’une des expériences les plus WTF de ma vie. Depuis, ledit blog a succombé aux assauts gratuits mais néanmoins victorieux d’un piratage massif, ce qui a eu le bon goût d’éviter au monde de subir trop longtemps ma prose de l’époque. Ceci jusqu’à ce qu’Audrey fasse un brin de spéléo dans ses archives pour ressusciter la bête et que les ennuis reprennent. C’est vintage dans le coin.

Et là ? Je ne sais pas trop d’où sort le sursaut narcissique qui me conduit à relancer un blog. La fin de la COP21, un retard de RER, un élan de procrastination mal placé…Que sais-je ?

J’ai tenté de réfléchir à une belle ligne éditoriale, avec des rubriques bien séparées, bien cadrées, des thèmes forts pour porter des idées de fond avec du sens, yada yada.
Au final je pense que ça sera juste de la digression massive sans queue ni tête, qui aura comme principal enjeu d’être apodictique (j’ai appris ce mot la semaine dernière) et, dans la mesure du possible, distrayante pour un maximum de gens. On va voir où ça nous mène et surtout pour combien de temps, vu qu’en ce moment je change de marotte à peu près toutes les trois semaines. Ah, et comme je préfère taper des bêtises sur mon clavier plutôt que de passer des heures à aligner des pixels, vous risquez de subir le look « so 2010 » de ce blog un bon moment. Voilà.

Sur ces belles paroles, en voiture Simone.

Procrastination et autres digressions useless.

Me voici de retour à Paris, après un voyage presque sans histoire: vous vous souvenez de l’unique vieux pull qui m’a accompagné en Inde et dont je vous ai parlé dans le post précédent ? Et bien j’ai eu la très mauvaise idée de le filer au pressing de l’hotel et depuis ce jour fatidique il est porté disparu. J’ai donc effectué ma petite dizaine d’heures d’avion en t-shirts (en mode multicouche hein, à raison de trois épaisseurs), pour débarquer à Paname en grelottant un tantinet. Paris donc, qui est par ailleurs une ville incroyablement calme, silencieuse, propre, avec des trottoirs vaste comme des avenues. Dépaysement garantie. On reprend vite le pli hein, j’ai déjà fait tellement de trucs que j’ai l’impression que ça fait un mois que je suis rentrée.

Et donc, sans transition, je voudrais dédier les lignes suivantes à mes petits camarades de promo qui ont, comme moi, une thèse professionnelle à rédiger. Après quelques années d’études, une chose est certaine: la maîtrise de la procrastination dans toute sa splendeur a atteint un niveau tel que l’on peut affirmer sans rougir que certains en ont fait un art. Et c’est là que se trouve la vraie valeur ajoutée de ces années studieuses, ce petit «plus» qui fait la différence et contribue a former des individus à la personnalité riche, des jeunes gens ouverts, curieux de tout, qui savent se prendre en main et assumer leur responsabilité…

Les faits parlent d’eux-même:
Grâce à la thèse professionnelle et autres rapport de stage, les étudiants deviennent de véritables fées du logis: Vous avez déjà essayé de rédiger un paragraphe sur la logistique indienne alors qu’une chemise froissée git sur votre lit et que deux assiettes sales se battent en duel au fond de de votre évier ? on est d’accord, c’est impossible.

De même, on ne peut pas s’imaginer aborder les problématiques douanières de l’import-export sans suivre l’actualité en temps réel sur le web, à grand coup de cyber-zapping toutes les 5 minutes sur «Le Monde» ou «Infoconcert». Avec bien évidement Facebook en tâche de fond, au cas-où un ami suggère dans son statut un ouvrage indispensable traitant des derniers logiciels de gestions de stocks disponibles sur le marché. Sait-on jamais.

Bref, la rédaction de quelques pages de cette fameuse thèse m’a également offert suffisamment de prétextes pour me remettre à la guitare, découvrir de nouvelles séries US ainsi que quelques cafés et autres restaurant, et rôder un peu en quête de nouvelles fringues. Parce qu’évidemment, si on est pas sapé de façon impeccable avec des habits flambants neufs, il est tout de suite impensable de bosser seule chez soi devant son ordi. Sans oublier, choses importantes s’il en est, des occasions de se remettre au sport ou faire un peu de cuisine car il faut garder «un esprit sain dans un corps sain», c’t’important. (Pis zut quoi, chuis en vacances là, moi…). C’est incroyable la myriade de trucs totalement cruciaux et urgentissimes qui peuvent survenir lorsque l’on ouvre word avec la vague intention de «bosser un peu en s’y mettant à fond». La rédaction de ce post de blog en est le meilleur exemple, étant donné qu’il est la conséquence directe de l’écriture de deux lignes concernant les systèmes de référencement et les nomenclatures de fabrication industrielles. Procrastination je t’aime.

Si vous ne souhaitez pas profiter de ce genre d’exercice scolaire pour booster votre épanouissement personnel et devenir un maestro de la polyvalence multi-tâche en préférant taffer comme un bourrin…Au moins parviendrez-vous peut-être à éviter de finir votre rapport à 4h du mat’ le jour de l’échéance, au milieu des cadavres d’une demi-douzaine de canettes de Red Bull. Bref, l’autoroute parfois un peu austère des connaissances étudiantes est bordée d’itinéraires bis et de mignons petits chemins rieurs où il fait bon flâner et entamer une pause pique-nique avant de se retrouver bloqué dans les embouteillages des retardataires de retour de vacances.

Tout ça pour dire…fermons cette parenthèse et abordons le sujet suivant. A savoir le fait que je ne suis pas totalement sûre de la raison d’être de ce blog qui fonctionne par sursaut de créativité spasmodique 2 mois dans l’année depuis mon glorieux retour de Londres en avril de l’an de grâce 2009. Ça fait maintenant un peu plus de deux ans que ce concentré d’âneries existe, avec un layout qui n’a pas muté d’un pixel. Et je suis pas certaine de pouvoir continuer sur cette lancée sans sombrer inexorablement dans les affres du racontage de vie bête et méchant. Donc…sauf si les circonvolutions potelées de mon mignon cerveau trouvent d’autres sources d’inspiration, ce blog va très probablement entamer une petite phase d’hibernation. On se dit à la prochaine…

Dernière ligne droite.

Les ptits loups, l’heure tourne. Dans plus ou moins quatre jours, je braverai une dernière fois le trafic indien pour rejoindre l’aéroport et mettre le cap sur Paris. J’aurais pourtant aimé vous parler d’encore une foultitude de choses :

  • Des records que l’on admire sur les routes :
  1. 5 indiens sur une Honda 150cm3 (père-mère-enfants-bébés…au moins si la moto se plante, tout le monde ramasse…) ;
  2. 10 dans un rickshaw : 6 à l’intérieur et 4 en rappel à l’extérieur…sachez que la contenance classique est de l’ordre de 3 européens pas trop baraques autrement le moteur cale dans les côtes ;
  3. Et enfin le stationnement en triple file minimum qui vous transforme des parkings complets en casse-tête chinois.
  • De mon chauffeur qui a très vite compris que pour calmer 3 français bien remontés à l’arrière de sa bagnole après un accrochage avec les flics, y avait rien de tel qu’un CD de Lady Gaga.
  • Et (puisqu’on en parle) de mes nouvelles mésaventures avec les forces de l’ordre et des services de sécurité. Ils sont lâches. Et intolérants. Et useless. Je ne les aime pas.
  • Du Village dans son état actuel : désert dans la brume poussiéreuse de l’aube, avec les détritus jonchant le sol et les silhouettes déchiquetées des structures qu’on démonte entre les résidences abandonnées, on se croirait perdu dans Silent Hill le jour de Noël.
  • Des défonçages de cloisons à grands coups de lattes, LA spécialité des  contremaitres roumains/tunisiens bien dans leurs baskets. Personnellement j’y vais avec un peu plus de délicatesse et je me contente d’un petit bond gracieux au-dessus des murs avec deux workers pour me faire la courte échelle. Pour obtenir des clés dans ce pays, faut prendre rendez-vous 15 jours à l’avance, préparer un classeur blindé de formulaires avec chacun 3 coups de tampons différents, avoir un forfait téléphonique illimité, risquer sa vie dans La Maison Qui Rend Fou (Asterix avait raison sur toute la ligne, hormis sur le fait qu’elle se trouve en Inde et non pas en Égypte) et faire des libations d’hectolitres de lassi sur l’autel des cas désespérés en chantonnant du Patrick Sébastien déguisé en Grand Schtroumpf pendant une éclipse le jour du solstice d’hiver. S’il neige ça marche encore mieux.
  • De certains chefs-d’œuvre indiens…je n’ai malheureusement pas eu l’occasion d’en voir des masses, mais quand on voit ce qu’ils ont pu bâtir en 5 ans, par exemple, on se demande comment ça se fait qu’ils n’aient pas bouclé les Jeux en deux coups de cuillères à pot. Impressionnant.

Prise de guerre.

Et j’en passe. Mais j’ai pas trop le temps là, et tout ça me donne envie de dresser un petit bilan, vite fait. Parce que c’était quand même une sacrée expérience. L’Inde est loin d’être un pays tendre, c’est un fait. J’ai aussi passé le plus clair de mon temps ici à bosser, ce qui au final était un tantinet aliénant. Mais c’est un train de vie assez incroyable, sans aucune routine ni temps mort. En travaillant à l’étranger avec des gens que vous côtoyez quasiment 24h/7j  sur des projets pareils, les règles sont fondamentalement différentes de ce que vous pouvez trouver dans des bureaux parisiens. Ajoutez à cela que la plupart de ceux qui sont ici ont un parcourt atypique et viennent d’un peu partout : Humainement, c’est une autre dimension. Il y a ces rares et fabuleuses soirées où les « vétérans », réunis autour d’une vodka ananas dans la cour d’un quelconque palace indien, font leurs récits de leurs guerres : des lampes orientales répandent une faible lumière orangée sur l’assemblée, trop diffuse pour chasser complètement les ombres qui se découpent sur les visages. Le décor est planté et un parfum d’encens et d’aventure flotte dans l’air:

– Tu te souviens de la Confèd’ Cup en 2009, Joe ? le jour où on a mis la pression au premier ministre ? on est retourné au chantier après la réunion et on s’est retrouvé tous les deux à creuser une tranchée derrière un stade à 2h du mat’ !

– Oue. (Une rasade de cocktail). Putain d’Angola…

Je force à peine le trait, et c’est juste magique : on dirait les radotages sur la guerre du Vietnam de deux vieux GIs au comptoir d’un bar. Tout ça pour dire, on a un peu l’impression d’être dans un autre espace-temps et le décalage au retour va me faire un drôle d’effet. Des missions pareilles, c’est assez fou et honnêtement, complètement top.

L’autre effet secondaire d’un séjour dans ce genre de pays c’est que tous les menus soucis qui vous encombraient l’esprit avant de partir se sont évaporés et…hein ? Quoi ? Des problèmes ? Mec, cherche pas, ma vie est juste parfaite.

Ceci dit, je suis pas mécontente de rentrer au bercail : je me sens usée, j’ai mal partout et un petit changement de rythme me ferait du bien. Ce qui me fait penser que je vais copieusement rigoler en débarquant à Roissy avec ma valise (cassée) : un jean d’été, un t-shirt et mon unique vieux pull sur le dos…j’avais pas pensé aux menues variations météorologiques en faisant mon sac il y a deux mois. J’vais être aussi réchauffée qu’une antilope parachutée sur une banquise, ça va être sympa tiens. On en reparle la semaine prochaine !

Sur la même longueur d’ondes. Enfin presque.

Les ptits loups, s’il y a bien un truc qui est complètement exotique en Inde en général, et aux Jeux du Commonwealth en particulier, c’est la communication.

Peu importe le nombre de jours/mois/années que vous avez pu passer en pays anglo-saxons (ou devant des séries US), sachez que le plus bel accent que vous pourrez sortir ne vous servira à rien ici. A rien. Plus vous parlerez franglais, mieux on vous comprendra. Du coup vous forcez le trait et vu de l’extérieur ça fait doucement ricaner tant on tombe dans la caricature.

Imaginez que deux mois à ce régime, c’est un coup à bousiller proprement des années de boulot pour gommer l’accent français (genre) et faire une croix sur les bénéfices d’un séjour à Londres. Ce qui sauve tout ça ici, c’est le nombre d’étrangers en direct import du Royaume-Uni qu’il y a au m². C’est bien connu, la première réponse que l’on obtient d’un londonien à qui on sert du franglais c’est un regard ahuri entre 3 clignements de paupières interloqués. Enfin, je me moque, mais quand un indien me parle anglais je capte à peu près un mot sur deux. J’ai fait des progrès. Par contre au téléphone y a intérêt à s’accrocher, surtout si vous êtes à côté d’un fenwick qui ronronne avec l’enthousiasme d’un chaton obèse de 15 tonnes, asmathique de surcroit : on panne que dalle.

Après il y a les discussions avec les Indiens qui parlent uniquement hindi. Ça donne ça :

Il est 10h30. Après 2h de fouille, vous dégottez enfin dans un terrain vague le camion que vous attendez pour vider une zone, un magnifique semi-remorque à la cabine bleu pétrole dont l’intérieur est envahie de guirlandes arc-en-ciel et d’étoles en tout genre. De la pop indienne grésille depuis le téléphone portable posé sur un siège, une casserole boue sur un réchaud côté passager et ça sent plutôt bon. 4 pompons noirs fixés aux essuie-glaces pendouillent sur le capot au-dessus d’une roue de secours constellée de pois multicolores, fixée telle une figure de proue un peu rouillée, alors que les restes des foulards rouges accrochés aux cadavres des rétroviseurs s’agitent mollement dans l’air chaud qui vous entoure. Blagues et sarcasmes mis à part, j’adore leurs camions.

Il est pas mignon celui-là ? avec sa pièce montée meringuée sur le toit ?

Me: You speak English ?

Lui: yessir.

Me : Ouère are you workingue, toumoroh ? (en franglais, évidemment)

Lui: T’ickey, sir (traduction : « okay, sir »)

Donc là, c’est sûr, on tient le bon bout…ajoutez à ça la manie du pays qui consiste à dodeliner de la tête à chaque question et vous comprendrez qu’un Européen basique est parti pour galérer un moment : un indien ne fera jamais « oui » ou « non », mais un mix des deux en faisant osciller sa tête de gauche à droite, d’une épaule à l’autre. À l’instinct on traduit ça par « peut-être ». Pas très clair mais super pratique, je suis d’ailleurs en train de prendre le tic. Et mes collègues vont me mettre des claques si je ne surveille pas ça un minimum…

Le deuxième mode de communication universel du pays, c’est la paperasserie. Ici ils sont raides dingues des formulaires, des cartes d’accès, des badges…de vrais champions en matière de déforestation administratives. Les modalités d’accès à un site surveillés varient suivant les jours, les heures et le tour de bide du commandant en chef qui vous lorgne depuis sa chaise en plastique. Ne cherchez aucune logique : Ce matin, après 20min de pow-wow devant une barrière d’accès et quelques coups de fil, j’ai finalement pu aller bosser en filant au sergent un bout de papier daté de la semaine dernière sur lequel était inscrit  en police Verdana 18 (en gras) : « Exit autorisation pass  for truck », orné du spectre d’une signature très solennelle d’un pseudo haut responsable de site (en l’occurrence, c’était la mienne…). Okay.

Moralité, si vous voulez entrer n’importe où en Inde, emportez dans vos valises une liasse de feuilles ornées d’un joli coup de tampon et sur un malentendu y a moyen que ça passe.

Allez zou ! on remballe !

Il y a quand même une chose à retenir de tout ça : les Jeux ont bien eu lieu. Je suis passée vite fait au Village en cours de semaine pour checker deux-trois bricoles et « Oh surprise », il y a eu des métamorphoses depuis ma dernière descente sur place. Des athlètes partout, des installations qui fonctionnent à plein régime, des boutiques de souvenirs pleines de vuvuzelas.

Oui, vous avez bien lu, même ici on y a eu droit…j’ai considéré en acheter une ou deux (voire une caisse), pour les utiliser à la fenêtre de la bagnole histoire de traumatiser les rickshaws et autres motards à l’arrêt pendant les embouteillages. Avec un regard sadique et toute la puissance de mes petits poumons musclés. Jusqu’à l’apoplexie. Par pure vengeance. Parce que quand ça bouchonne à Delhi (genre régulièrement) avec leur vénération fanatique du bruit et du klaxon, c’est l’Enfer sur Terre. A côté, les avertisseurs sonores d’un périph’ parisien c’est une petite musique de nuit. Donc : œil pour œil, tympan pour tympan.

Bref, même si tout n’a pas été parfait, c’était loin d’être ridicule et honnêtement, ça m’a fait super plaisir (je parle des Jeux hein, pas des vuvuzelas). Un beau challenge. Quand on voit où en était la situation, ne serait-ce que 48h avant l’ouverture, on regarde forcément tout ça avec un peu d’émotion.

Mais pendant que tout ce petit monde raflait des médailles, ça commençait déjà à s’agiter backstage pour commencer à plier discrètement bagage. Certains arpentaient les terrains, faisant fondre la semelle de leur converses sur des pistes de cyclisme brulantes. D’autres faisaient le tour des stades pour chercher des camions égarés : Sachez qu’un conducteur indien peut vivre quelques jours très peinard, sans bouger de la cabine de son poids lourd, en attendant que vous le débusquiez quelque part en rase campagne. Ils sont fâchés avec les plans dans ce pays. Ça peut durer trèèèèèès longtemps, je vous préviens, on a des records de presque une semaine. Ou alors un conducteur de camion un peu relax peut  très bien se barrer en laissant son véhicule sur le bord de la route pour aller se chercher à manger, puis taper une sieste de deux heures sous un arbre…avant d’aller livrer son matos (qui porte évidement l’étiquette URGENTISSIME) 300m plus loin. 300m en 2h. Si ça c’est pas de l’optimisation de planning, je sais pas ce que c’est.

Et après les flics au portique de sécurité vous serinent 1h de plus, mitraillette au poing, parce que les rouleaux de papier bulle dans le conteneur sont pas tout à fait ISO 9001 et que, comme ils ont un doute sur la sécurité, il faut tous les passer à la machine à rayon X. Tous. La machine en question a le format de celles utilisées pour un contrôle bagage à l’aéroport alors pour scanner un camion vous pensez bien qu’on a le temps de se faire un thé ou douze. Puis après on sort le compteur Geiger, car après-tout, sait-on jamais, dès fois qu’un ouvrier ait planqué une ogive dans son baluchon…

Bref, vous comprenez mieux pourquoi on était un peu short avec 7 ans pour organiser tout ça…

Mais c’est cool, au moins le soir au resto on se marre bien !  et ici on relativise vite  : l’Inde c’est pas exactement un pays de bisounours alors un retard sur le planning c’est difficilement vu comme un drame (Sauf sur ce blog mais c’est mon côté artistique qui donne cet effet. Théâtralité oblige. Voilà.)…la vie est loin d’être tendre pour tout le monde dans ce pays mais ceci est une autre histoire.

Bref. Grand retour au Village la semaine prochaine. En attendant, je vais passer mon temps entre les bureaux, les sites et le dépôt secondaire : un hangar perdu dans la cambrousse indienne, confié à la vigilance d’un vieux gardien de sécurité armé d’un mousquet (true story) et de son fidèle compagnon, un labrador à trois pattes mangeur de testicules (true story aussi). Stay tuned.

Un peu de paillettes dans ce monde de brutes.

Parlons peu, parlons bouffe. Ma plus grande déception en arrivant ici, c’était les repas. Au Village, c’était Mac Do tous les midis, (ou Subway, au choix) rapporté par les chauffeurs sur le site. Disons que le Village c’est un peu loin de tout type de resto quelconque, que c’était trop le rush pour s’absenter longtemps et que de toute façon le fait de devoir faire 2 bornes minimum sur le site pour trouver un truc qui ressemble à des toilettes, ça encourage pas des masses à faire l’aventurier en matière de bouffe les premiers jours …
Une semaine à se nourrir avec 6 pauvres nuggets tièdes/jour et une micro-frite, parce que là-bas c’est des portions format « nourrisson et petite enfance ». Le drame.

Jusqu’au jour faste où la cantine du Village a ouvert ses portes. Bon, ce jour-là les cuistots en étaient à leur coup d’essai et avaient complètement zappé qu’il n’y avait pas que des indiens sur le site. Du coup on a eu la version assaisonnée comme à la maison : Je mourrais tellement de faim ce jour-là que j’ai dégommé la moitié de mon assiette avant de réaliser que ça cramait méchamment. Tout ça pour ressortir de la salle repue et ravie mais avec les lèvres qui brulaient autant que si j’avais roulé un patin au dragon de Shrek et le sentiment d’avoir une chaudière entre les côtes. Depuis, j’ai pris un peu l’habitude et la bouffe indienne, c’est indéniablement bon.

Après y a eu les bureaux, avec les livraisons de Domino’s pizza entre deux coups de fils. Ça, c’est la version «putin le stress trop d’boulot j’m’en sors pas aaaaaaaaah», avec un squat au petit resto indien à côté de l’hôtel le soir. Mais, les p’tits loups, les choses ont changé.

Quand on bosse à l’étranger, il y a ces mots magiques : Per Diem. Une grosse liasse de roupies qui tombe sur votre bureau pour couvrir vos frais journalier en plus de votre salaire. Ce qui n’est pas le cas quand vous bossez au pays parce que c’est bien connu, le cout de la vie est plus élevé en Inde qu’à Paris, surtout pour un stagiaire (blague). Mais en l’occurrence, je ne vais surtout pas me plaindre hein 😀

Le Mac Maharaja. Découverte culinaire du mois. Ou pas.

Rapporté au niveau de vie du pays, ce petit bonus vous permet juste de vivre comme un golden boy à plein temps. Et depuis une semaine, maintenant que les Jeux sont lancés et qu’il est possible de faire de vraies pauses repas et d’envisager de quitter le bureau avant 21h, je vous raconte pas les dégâts.

Mes collègues m’ont enrôlée dans une espèce de marathon qui consiste à squatter tous les restos des palaces de la ville. La décadence totale. En bon être humain, je résiste à tout sauf à la tentation : Une semaine de festins gargantuesques. No limit. Le clou du show c’était dimanche dernier à l’occasion d’un brunch très corporate pour fêter l’ouverture des Jeux : Avant de me lancer, je pensais que le champagne à 10h30, pour digérer un bon gros breakfast à l’anglaise, c’était pas une bonne idée. Surtout en open-bar. En fait, ça passe très bien.

Alors ouiiiiiiiii, je saiiiiiiis, c’est pas local, c’est pas typiiiiiiiiiiiiiiique…mais j’vous jure qu’au bout d’un mois, le local et le typique, quand on fait des journées de bourrin sans un iota de tourisme :

  1. On peut très bien s’en passer quelques jours.
  2. Entre nous, on n’en a plus rien à foutre.

Le plus scandaleux là-dedans c’est que, comme personne n’est à l’abri d’une descente express dans un dépôt crade et glauque, c’est la grande mode clochard. Le clodo-chic. La tête des portiers quand ils voient débarquer 15 pouilleux, avec des jeans troués et des converses dégueux devant leurs hôtels de luxe, c’est pas triste. Quand je pense qu’avant d’arriver ici j’ai envoyé un mail pour savoir si le tailleur était de mise…Pour découvrir un environnement tellement à l’arrache et crado que les négociations terrain se font sur une planche posée sur de vieux bidons d’essence, avec un client en basket et un responsable de site en short. Z’ont du se payer une bonne barre de rire au bureau, tiens, en me lisant.

Du coup j’ai débarqué à Delhi avec toute une tapée de vieux t-shirts autres attirails d’une autre époque et en partant bosser le matin j’ai parfois l’impression d’avoir 14 ans. Mes fringues parisiennes commencent à me manquer méchamment.

Ça et puis, pour achever le sujet bouffe, le fait indéniable qu’il n’y a pas de vrais steaks dans ce pays commence à me rendre complètement nostalgique. Heureusement que j’ai découvert ce resto australien qui fait des burgers de champion parce que passer encore un mois à ce régime c’était un coup à attaquer une vache sacrée à la fourchette.

En attendant la fin des Jeux…

Kids, j’ai survécu au Village. Veni, vidi, vici, là. Les derniers jours là-bas ont été un véritable parcourt du combattant, principalement à cause d’une planification pifometrée à la louche, ayant pour conséquences des mesures de sécurité bordélique et mises en place de façon fort tardives. Au passage, ne vous inquiétez pas en lisant la suite hein, dans le fond tout se passe bien et je préfère largement être ici que dépérir inutilement à Chatillon ! Mais sur ce blog, la tradition veut que je vous serve les évènements avec une bonne dose de cynisme et de râleries…alors c’est parti 😉

Mais tout d’abord, qu’est-ce qu’un flic, aux Jeux du Commonwealth ? Simple :

– Vous prenez l’indien au regard le plus bovin possible, avec un gros bide et une moustache, vous le fringuez en kaki et vous le posez le cul sur une chaise 12 heures d’affilées. Tadaaaaaam !

– Activité principale de la journée : bouffer à longueur de temps et vous regarder trimer comme un galérien avec votre équipe, et se barrer comme un filou en laissant tout en bordel et en organisant une décharge publique dans un coin de salle obscur.

– Autre signe distinctif : végète en meute de 25 individus pour faire bonne mesure, ne risque pas un cheveu autour d’un périmètre de 20m², et il y en a grosso modo un troupeau tous les 80m. Horripilant.

– Sport favoris : rackette systématiquement tous les membres du staff à l’entrée sous prétexte que les clopes sont interdites sur le site (blague), tout en demandant innocemment : « do you have perfume ? » (c’est ça oue, et tu veux pas non plus 100 balles et un mars temps qu’on y est ? non mais sans dec…).

– Utilité quelconque : Nulle. Mais de temps en temps (genre vers 17h, quand il fait un peu moins chaud), se lève, saisi un bâton, fait 20m et le plante vigoureusement dans le sol pour vérifier qu’il n’y a pas une bombe. Puis se rassoit, épuisé.

Specimen isolé en pleine action.

A part ça, il y a eu ce jour unique et fabuleux où ils nous ont interdit sacs, talkie et téléphone, comme ça, sur un coup de tête : genre on a des pigeons voyageurs au Village. A ce rythme on pensait devoir bosser à poil le lendemain.

Mais en fait le jour d’après ils ont interdit l’approvisionnement en eau. Alors passer une journée avec un litre d’eau pour 4, vu le climat et l’activité, je vous assure que c’est un coup à prendre très TRES cher.

Et finalement, le jour suivant, ils ont interdit l’entrée à toute la main d’œuvre. C’est pas comme si on avait 3 mois d’avance sur le planning donc ça tombait super bien, vous pensez bien. C’est comme ça que tout le staff (5 personnes, sur tout le site ça fait franchement peu) s’est retrouvé à mettre les mains dans le cambouis pour avancer malgré tout, que certains se sont improvisés pilotes de poids lourds et que je me suis retrouvée aux commandes d’un fenwick pendant un bout de matinée. Mais ça c’était marrant en fait, heureusement qu’on m’avait donné un cours avant pour le fun, ahah !

Et guess what ? Les Jeux auront quand même lieu. Crazy.

Y a juste eu quelques scandales sur la propreté du site. Tu m’étonnes. Et encore, les journalistes ne sont pas allés faire un tour au dépôt parce que là on vit de grands moments nutella : la warehouse sert tout à la fois de salle à manger, de chenil, de nid de serpents, de chiottes publiques et de décharge. Une catastrophe sanitaire, y a de quoi démarrer une guerre bactériologique là-dedans. Ça plus les flaques d’eau stagnantes de la mousson mélangées à d’autres trucs (dont on préfère ignorer la nature) et les armées de moustiques qui ont refilé la dengue à la moitié des équipes…et comme il y a pas la clim, tout ce petit monde macère allègrement par 40° en un immense bouillon de culture. Tout de suite ça donne envie d’y passer ses journées. Heureusement que je bossais pas trop là-bas parce qu’à long terme y a moyen que ça tue un bonhomme.

Bref. J’ai quitté temporairement ce lieu hostile pour rejoindre les bureaux : quelques tentes installées dans un complexe de salles d’exposition plus ou moins à l’abandon, une sorte de grand bâtiment pyramidal probablement issu de l’imagination d’un architecte un peu geek fan de Stargate. Les flics y sont encore plus chiants (true story !) et les horaires toujours hardcore, mais au moins on peut rester assis 75% du temps, et en plus on apprend plein de trucs.

La photo doit dater du siècle dernier parce qu’en vrai c’est chouia plus usé. Et avec, genre, des fuites.

15 jours chez les Village People

« Bienvenue en Enfer ». Ça, c’est la première chose qu’on m’a dite quand j’ai mis les pieds au Village. Le deuxième accueil s’est soldé par un « Welcome in South Africa », lancé par un chef d’équipe avec des cernes jusqu’au menton qui avait pas réalisé que la World Cup (comme ils le disent affectueusement là-bas) était fini depuis une paye et qu’il avait changé de continent. Okay.

Cinq minutes après être entrée dans le sacro-saint de l’État-major des lieux (à savoir un container de camion climatisé avec 6 chaises autour d’une pauvre table aussi défigurée qu’après un séjour en ZEP), on m’a servi un grand moment de craquage sur Waka Waka, craché par des haut-parleurs de PC un peu usés et 3 membres du staff (un peu usés eux-aussi) qui gesticulaient les bras en l’air. Okay.

Pour la petite histoire, les ¾ de l’équipe postée en Inde sont passés par la case Sud Af’ avant d’atterrir à Delhi et on n’imagine pas les dégâts collatéraux que Shakira a infligés à ces pauvres gens pendant leur séjour. (Amis Insaliens, dites-vous que pour eux, cette chanson, c’est grosso-modo l’équivalent de Jésus revient pour un Ziket’. C’est dire.)

Bref, petit pétage de plomb, qui peut s’expliquer assez facilement par le fait qu’à partir du 3 octobre c’est le lancement des Jeux du Commonwealth : 11 jours de compétitions pour 70 nations et le plus grand évènement sportif organisé par le pays depuis les années 80. Simplifions les choses, et appelons un chat un chat, c’est un bordel absolu et à l’heure actuelle les indiens sont complètement à l’arrache.

Et en l’occurrence, le Village des athlètes, c’est la jungle. Déjà parce que ça fait au moins une semaine qu’il aurait du accueillir des gens et qu’on en est au stade de poser des câbles entre les apparts’, les trottoirs déchiquetés et les chiens errant. Qu’il fait au bas mot 35° et qu’une journée là-bas s’accompagne invariablement de 15 bornes parcourues à pied et de 4 cadavres de bouteilles d’eau. (Si vous êtes chanceux y a parfois un tracteur ou un semi-remorque qui peut vous prendre en stop). Le pire c’est quand il pleut. Normalement la mousson aurait du s’achever il y a 2 ou 3 semaines mais visiblement y a un mec là-haut qui a décidé de faire du zèle. Et quand il pleut en Inde, c’est pas des gouttelettes de fillettes : vous survivez 5 minutes sous un parapluie/cape de pluie en évitant les flaques (pardon, les torrents)…mais passé ce délai vous êtes tellement trempés qu’après tout, autant laisser tomber les subtilités et patauger allègrement dans la flotte en-t-shirt.

La mascotte, qui était probablement prévue à la base pour représenter une marque de céréale pour gamin.

Bref : je voulais de l’action, du terrain, du réel…je suis archi-servie. Et aussi très contente, au moins on s’ennuie pas ici. C’est la première fois de ma vie que j’arrive à oublier à quel jour de la semaine on en est. Et aussi la première fois que je m’endors comme une loque sur ma chaise pendant une pause café.

La sécurité s’accroit aussi petit-à-petit et la moindre excursion sur un site s’accompagne invariablement d’une ou deux fouilles de sécurité. Au passage, je sais pas quelle vidéos on a fait mater aux fliquettes indienne pendant leur formation mais je pense qu’il y a eu un petit malentendu : généralement quand on essaye de palper la poitrine d’une nana aussi franchement, c’est pas pour une fouille au corps mais passons…les flics ici c’est du collector, faudra que je vous en parle un peu plus à l’occasion. En attendant, croisons les doigts pour qu’une bombe n’explose pas dans le coin…

En ce moment le programme est donc plutôt musclé mais l’ambiance est très bonne et y a un peu de tout. Dans ma team y a du roumain, du tchèque, du français, du sud af’, de l’anglais et même un suisse. Majoritairement, on parle principalement la langue de Shakespeare et aussi beaucoup, beaucoup le langage des signes quand il s’agit de bosser avec les indiens. Pas mal de gesticulation et entre ça, la marche à pied et le climat on n’est pas loin d’avoir l’efficacité d’un centre de Fitness un peu roots. Sérieux, que demande le peuple ?

Ah putiiiiiiiiin, le feu rouuuuuuge !!!

Les enfants, la première chose qui vous frappe vraiment en Inde quand vous arrivez à l’aéroport et que vous grimpez dans un taxi, ce n’est pas cet air chaud et humide qui se referme sur vous tel une serpillère ébouillantée, ni les regards des indiens, pourtant quasiment aussi lourds que l’atmosphère pour ce qui est de mater sans vergogne. Au passage, c’est la première fois que je débarque dans un pays où les habitants vous regardent avec autant d’insistance. Quand on s’est habitué au métro parisien ou la tradition veut qu’on se fasse démonter la tête si on fixe quelqu’un plus de 2sec, ça fait bizarre.

Non, folks, même si tout ceci vous interpellera forcément, le vrai choc culturel est ailleurs et il rôde sur toutes les routes hindoues, sous des formes aussi diverses que variées, de préférence métalliques et plus ou moins motorisées.

Je mets au défi n’importe quel conducteur européen (même Lyonnais) de rester stoïque lors de sa première ballade en taxi. Le passage de la première bretelle d’autoroute vous laissera tassé au fond de votre siège, l’air aussi détendu qu’un lapinou pris dans les phares d’un poids lourd et le palpitant bloqué au rythme d’un solo de castagnette andalou. J’vous raconte pas le coup de stress.

Passées trente secondes, un rire nerveux à peu près aussi guilleret qu’un crissement de fourchette au fond d’une assiette vous échappe, et c’est à ce moment qu’il faut trouver la force de désincruster vos doigts de la poignée qui se trouve au-dessus de la fenêtre, avant de la broyer pour de bon.

Une fois qu’on a compris que les lignes tracées sur le bitume sont juste là pour la déco et non pas pour tenter de délimiter des voies de circulation, on parvient à se détendre un peu. Quand on vous aura fait deux ou trois queue de poisson, vous réaliserez que la coutume consiste à déboiter au ras de la carrosserie pour doubler. Mais ça va parce qu’à l’arrière des véhicules il y a marqué « Horn, please », ce qui est le signal universel ici pour annoncer une action  de conduite quelconque et qui a relégué les clignotants au rang d’éclairage à peine plus informatif qu’une guirlande de Noel électrique à l’arrière d’un semi-remorque.

Quand on arrive en ville, les surprises continuent…mais comme une bonne vidéo vaut mieux qu’un long discours…(ça aura le mérite de vous donner de la matière à méditer la prochaine fois qu’on vous grillera une priorité):

En matière de véhicule, il y a à peu près de tout, de la moto aux célèbres tatas en passant par les vélos et les pousse-pousse…okay, rien d’original là-dedans mais il y a aussi ces nuées de petits taxis jaunes au toit vert appelés rickshaw : une sorte de croisement entre une mobylette et un pousse-pousse enroulé dans un truc qui ressemble à une carrosserie plus ou moins décapotable. Il y en a partout et monter là-dedans c’est sensation garantie, surtout quand on déboule pleine bourre à un croisement !

Tout ce petit monde évolue ainsi le plus naturellement du monde, alors que l’européen moyen se dit que le jour où il doit conduire dans un chaos pareil, il a intérêt à troquer son caleçon contre une couche. Mais franchement, passé la première frayeur (enfin, les 12 premières frayeurs…) c’est juste fascinant.